• Véronique Sanson | 2011


Olympia, Paris

du 28 février au 4 mars 2011

S'il est une réalité pour chacun d'entre nous, la sienne est de monter sur scène. De chanter sa vie, pleurer ses peines, partager ses doutes, réveiller d'anciens tourments, rouvrir d'anciennes plaies, les refaire saigner un peu, vérifier si la douleur est toujours vive ou bien si ses mots collent maintenant à un autre tourment, plus actuel. Confronter le passé avec le présent sous nos yeux, le temps d'une chanson. Son interprétation dépendra de ce kaléidoscope d'émotions, au souffle près.
Certains soirs, une phrase ne sort plus de sa gorge, qui trouve encore un peu trop d'écho dans les pensées qui traversent son esprit. D'autres soirs, le tourment est balayé et la phrase sortira presque dans un sourire...

Louis Jouvet a dit que le théâtre était le seul art pratiqué à heure fixe. Pour la scène, et pour Véronique en particulier, c'est ce qui rendra toujours chaque soir différent du précédent.

Un concert, c'est une alchimie. Entre Véro et Véronique Sanson tout d'abord – même si elle n'a pas pris de pseudonyme, ces deux-là ne font pas toujours qu'une. Entre la salle et la scène, ensuite.

Le public est un savant pêle-mêle, un grand écart qui va des gens qui ont vu de la lumière et sont entrés à ceux qui ont rêvé devant leur billet depuis qu'ils l'ont acheté.
Certains la suivent depuis des lunes, d'autres la découvrent tout juste. Certains acceptent le passage du temps, d'autres le regrettent. Certains jouent le jeu, d'autres voudraient en fixer les règles. Aux derniers, elle dit "J'ai de la peine de vous voir / Avoir de la peine pour moi aussi".



Si la jauge indique une petite baisse, si la flamme vacille d'un côté de la scène ou de l'autre, l'équilibre se refait naturellement : soit elle va puiser au plus profond de sa réserve d'énergie, va chercher la salle, sort ses sourires-killer, interpelle ("Vous êtes bizarres ce soir") ; soit, à l'inverse, la salle entière, touchée par sa fragilité, crie son nom, veut la réchauffer, la rassurer. Tout le monde a bien compris la nature de son carburant : les sourires, les gens qui bougent, les vibrations qui parviennent jusqu'à son cerveau.

Aimer quelqu'un ou quelque chose, c'est en sentir en soi l'écho, le reconnaître, et même si notre relation au spectacle vivant a changé, tout n'est pas cassé, tout n'est pas mort.

Jadis, il y a bien longtemps, un artiste se produisait des semaines d'affilée dans la même salle. C'était le temps où les distractions n'étaient pas si nombreuses et surtout pas si individualisées. Le temps d'avant les soirées passées à répondre à ses mails en retard, à partir à la recherche de vidéos, de contacts, de photos... Notre rapport à la musique aussi a changé. On l'écoute plus distraitement, un peu partout, et pas forcément dans des conditions sonores optimales. Mais c'est une autre histoire...




D'une semaine d'Olympia, remonte en vrac un bouquet d'images son sonore et américain "B. de B." lancé depuis la scène lorsqu'elle a aperçu Bernard de Bosson dansant debout devant son siège son "Je vais mourir un peu... et je reviens !", lancé le dernier soir avant les derniers rappels Tous les titres de Christopher et en particulier son sublime Don't be afraid le "yeahhh" sonore de sa mère, à gauche de la scène, le dernier soir quand il a annoncé Bethleem Bruno, voisin du premier soir, évoquant un mélange de Piaf et de The Rose pour résumer la soirée la surprise et le sourire d'enfant de Mehdi ouvrant les cadeaux de la chanteuse le soir de son anniversaire l'étincelant sourire de Véronique posant inlassablement avec chacun des invités backstage, écoutant leurs compliments, regardant chacun droit dans les yeux la mère et le fils échangeant leur Borsalino sur scène pendant Bernard's song jeudi soir François Bernheim criant "Bravo Titou" à la fin de son set Didier Varrod bluffé, avouant : "Après Omar m'a tuer, c'est Véro m'a tuer" ! le groove entêtant des refrains d'Annecy qu'on rapporte jusque chez soi et beaucoup d'autres encore...

1 commentaire:

  1. Tu as eu la chance, cher Laurent, de pouvoir assister à plusieurs des concerts de l'Olympia, et de pouvoir en faire une synthèse positive dans ton très bel article.
    Ceux qui n'auront vu que le concert du premier soir auront, peut-être, un point de vue plus mitigé, et on pourra les comprendre. Et ce, même si sa douleur efface sa faute.
    Bruno, le voisin du premier soir ;o)

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