• La 1re Nuit de la déprime | 2013

 Folies Bergère, Paris 
18 février 2013

On se souvient d'avoir croisé Raphaël Mezrahi alors qu'on se perdait dans l'invraisemblable dédale des coulisses de Pleyel, le 21 décembre dernier. Chemin faisant, ce drôle d'oiseau donnait quelques détails sur son projet de Nuit de la déprime. Arrivés dans la loge de Véronique, il exhibait sur son iPhone une photo dont il était très fier : Jacques Dutronc chez lui, en Corse, lumière fin de journée, son chat sur les genoux. Il avait dit oui pour un sketch vidéo. Raphaël tenait déjà un bon concept mais, avec son carnet d'adresses bien rempli, ça allait être le raz-de-marée côté résas. S'il avait su, il aurait bien pu louer le Zénith...

Deux mois plus tard, aux Folies Bergère, un lundi après-midi, jour de la saint Bernadette Soubirous. Pas tout à fait 18 h et déjà la queue devant l'entrée. Passée l'entrée des artistes, derrière des tentures noires, le hall apparaît revisité façon lounge (canapés, buffet, bar, écran…). Deux sacrés larrons à l'entrée : Hugues Aufray et Georges Augier de Moussac. Véronique leur tombe dans les bras. "Ça fait combien de temps qu'on s'est pas vus ?" lui dit Hugues. Sourires francs, bonne humeur, ceux-là sont de sa famille de cœur.
Un escalier d'époque sur la gauche et, au premier étage, un couloir de loges dans lequel la température avoisine celle d'un bon hammam.
Son nom est sur la porte juste en face. À droite, sur une petite table, des paquets, des paquets et encore des paquets de Kleenex, cadeaux du principal sponsor. Et pas l'ombre d'un pot de Nutella... :(
Une joyeuse armée de coiffeurs et de maquilleuses propose ses services. Des assistants passent voir si tout se passe bien : bonne organisation, bon esprit et sourire à tous les étages.
Nicoletta, déjà maquillée et coiffée, cherche sa loge. Elle a l'air particulièrement en forme. 
On frappe, c'est Catherine Lara (avec Samantha). Sa loge est à deux pas. Évocation d'hilarants souvenirs de vacances au bout du monde devant Michel Jonasz qui vient de débarquer.
Ce soir, Véronique sera à la scène comme à la ville : "Je suis en tenue de guerre (veste camouflage kaki) et la guerre, c'est déprimant" ! Ou encore : "La déprime, c'est pire que tout : c'est ne pas être heureux bien sûr, mais c'est aussi ne même pas être malheureux".
Raphaël Mezrahi, maître des lieux d'un soir entre à son tour, déclare fièrement qu'il a attribué la plus grande loge à Véronique. Il semble la décontraction même : on serait bien en peine de déceler chez lui le quart d'une once de stress. Il raconte comment il a choisi cet endroit pour son acoustique et comment il s'est occupé de tout, finançant lui-même la captation. Avec son "plateau de stars" (expression de la presse), la vente auprès d'une chaîne télé ne devrait pas poser de problème. "Et s'il y a des bénéfices, on pourra les reverser à une association". "Aux vieux !", lance Catherine Lara, assise dans un petit fauteuil. "Pas qu'on soit vieux nous-mêmes, mais faut penser à eux", ajoute-t-elle devant les éclats de rire. 
Elle sort bientôt : elle doit passer de bonne heure et va boire "un p'tit café (dans sa culotte)", bien sûr ! Une cigarette ? Non, elle préfère ne pas fumer avant de chanter. Véronique, elle, annonce qu'elle va tâcher d'en fumer le plus possible ! Mais comme il y a un bon Dieu pour ces choses-là (et surtout parce qu'on ne peut pas fumer dans le hall), elle ne pourra pas mener à bien (si on ose dire) son sinistre projet...
Allez, on descend pour la répète. Le piano est juste en bord de scène. Chouchou dans les cheveux, veste de combat, Véronique attaque Ma révérence dans sa tonalité d'origine, sans filet. La voix est bien là, l'intensité aussi mais Véronique cherche la sortie, comme si elle n'entendait plus au fond d'elle même cette "petite voix qui sourd et gronde"... "On peut la refaire ? Je peux la jouer plus vite si vous voulez". Tout va bien et la 2e version est juste une merveille de fougue et de désespoir mêlés. Et toujours cette  facilité instantanée à revivre pour de vrai l'émotion des textes...
Assis non loin, Christophe hésite encore sur ce qu'il va chanter : Les mots bleus ou Les marionnettes ? "Tu en fait combien toi, Véronique ?".
Des micros se tendent et des projecteurs s'allument mais Kanou veille : on remonte à la loge passer d'abord par la case maquillage-coiffage. Et, comme rien n'est jamais hasard, voici qu'arrive Jocelyne, "la meilleure maquilleuse du monde", qui connaît parfaitement les lieux puisqu'elle y a maquillé la troupe de "Salut les copains".
 
Il doit être 19 h et Véronique a faim. C'est bon signe. On descend lui chercher des sashimis au saumon avec lesquels elle fera de mini-sandwichs : deux tranches de poisson cru avec du wasibi entre les deux !
La voici bientôt prête à descendre dans l'arène. Et bien sûr prête à faire des détours : dans la loge d'à côté, c'est Enrico Macias qu'elle entendait gratter la guitare. Il l'accueille de son sourire chaleureux et elle le félicite d'emblée pour son "jouage" avant de lui rappeler que si elle est dans ce métier, il y est un peu pour quelque chose. "Tu ne te souviens peut-être pas mais il doit y avoir 45 ans, tu nous avais donné des contacts de maisons de disques...". Il lui embrasse la main, visiblement très ému de la voir.
Le hall est bien rempli, on y entend des "Ça m'fait tellement plaisir de te voir !" dans tous les coins. Une femme sourit à l'envi, déguisée en bonne sœur. Raphaël Mezrahi la présentera sur scène d'un "C'est le directrice du musée Grévin, elle est folle, c'est mon amie". Nolwenn Leroy quitte quelqu'un en lui disant "Je te laisse, il y a mon idole qui est là", se dirigeant droit sur Véronique, qui est vite devenue un pôle d'attraction : quiconque passant près d'elle la détecte comme un aimant, s'arrête et vient l'embrasser. L'occasion pour elle de croiser des gens qu'elle n'a pas vus depuis longtemps, ou d'en rencontrer de nouveaux. Se succèderont à peu près tous les participants : Alain Chamfort, Alice Dona, Gérard Lenorman, Chantal Ladesou et plus tard Amel Bent, Dani, Arielle Dombasle, Jean-Félix Lalane et Thomas Dutronc. Et même Jean-Luc Lahaye ou Phil Barney. Toujours prête à dégainer son sourire, ses yeux s'allument, ses mains volent : photos ! (avec Gérard Lenorman, Alain Chamfort, Alice Dona et un des coiffeurs)
On suit sur un écran le passage des uns et des autres. Chaque fois qu'il passe, et aussi pour faire nos "gros relous", on arrête le jeune assistant chargé d'aller chercher les artistes qui vont monter sur scène : "C'est quand le tour de la dame ?". Et chaque fois, il affiche le même sourire placide : on le sait depuis le début, elle est programmée assez tard et il faudra remonter d'abord en loge : à force de faire la bise à tout le monde, elle n'a plus de rouge à lèvres !

Retour dans le hall et, bientôt, c'est elle que l'assistant susnommé cherche : passage dans 5 minutes ! On approche de la scène, dans la pénombre de la coulisse. Si peu d'espace la sépare de la lumière... On aperçoit les spectateurs du balcon. Sous les projecteurs, Frédéric Zeitoun, dans son fauteuil roulant, reprend une chanson d'Aznavour. Véronique suit sa prestation avec attention. Lorsqu'il rejoint la coulisse, elle prend le temps de le féliciter vraiment, une main sur son épaule. Et on sait qu'elle le fait par sincérité, certainement pas pour se distraire de son trac.

Petit sketch de présentation vidéo (Raphaël en compagnie de Michel Sardou) et Véronique fait quelques pas, s'installe au piano. L'instant est sacré, redoutable : il s'agit de rassembler toute son énergie, de tout donner en moins 3 minutes. Mais ça, elle a toujours su faire... 
"Bonsoir les déprimés". On suit sa prestation sur le côté, puis derrière l'écran d'ordinateur d'un technicien dont on se demande comment il fait pour travailler avec autant de monde autour de lui et surtout un tel passage. 
La chanson est si courte, immédiatement bissée (la seule de la soirée ?). Véronique sort assez vite, trop vite pour Raphaël Mezrahi qui revient la chercher. Il sait qu'elle est bel(le) et bien la star de la soirée, que des gens ne se sont déplacés ce soir que pour la voir. Elle salue donc plus longuement, et en direction du balcon, puis traverse à nouveau les rideaux sombres.
Quelqu'un la prévient qu'il faudra revenir tout à l'heure pour la minute de silence – qui n'en sera pas tout à fait une côté public puisque défilent sur l'écran derrière la scène les produits qu'on ne trouve plus en France (les triscottes d'Heudebert, par exemple - mais aussi Gérard Depardieu !)...
 
Revenue à nouveau parmi nous, Véronique parle un moment avec Dani et Amel Bent (filmée pour les bonus ?) puis participe franchement à l'atmosphère de plus en plus potache en cherchant avec Thomas Dutronc des couteaux en plastique pour s'entre-tuer au moment du final ! Hélas, ils ne trouveront que des cure-dents... Qu'à cela ne tienne : elle en sortira un de sa poche sur scène pour occire Thomas Dutronc, déjà à terre ! 
Un projecteur s'allume encore, et Véronique dit un petit mot face caméra pour Raphaël, le remercie et termine en prenant une mine de circonstance : bien déprimée.

Le titre choisi pour le final n'est évidemment pas dû au hasard : Mourir sur scène ! Véronique, qui a pris Dani par la main, rejoint la scène avec l'ensemble des artistes présents. C'est Amel Bent qui a commencé seule – et assez superbement, il faut le souligner – le titre de Dalida, que Véronique ne connaît pas. Ce qui ne l'empêche pas de piger illico sa structure musicale pour improviser une chute dantesque et correcte sur le plan de la mélodie, mais avec ses mots à elle : "Je t'aimais avec mes bras" !
Applaudissements de folie. Raphaël remercie chaque artiste et – on est obligé de le souligner en toute impartialité – c'est le "Merci Véronique Sanson" qui remporte la victoire à l'applaudimètre. Laurent Baffie enchaîne en allumant Jean-Luc Lahaye ("Désolé de gâcher la soirée avec une bonne nouvelle, mais sa femme passe en CM2" !) qui non seulement ne le prend pas mal mais le racontera, un peu plus tard, avec un grand sourire. 
 
Les artistes sortent les uns après les autres sous l'œil d'une caméra, embrassant Raphaël, poussant des cris. "Merci pour ces moments merveilleux".
Non loin, un autre projecteur s'allume : Annie Lemoine photographie Véro avec son iPhone, puis aimerait bien aussi être prise en photo avec elle. 
Vivement la diffusion télé (et/ou la sortie en dvd) qu'on puisse apprécier pleinement les prestations des uns et des autres : Avec le temps (Catherine Lara), Manureva (piano solo par Alain Chamfort) ou le crépusculaire Les mots bleus (Christophe).

Photos © Laurent Calut.
Reportage vidéo CultureBox (sans Véronique)
"Ma révérence" (vidéo de Florence Bartolomé) 
"Ma révérence" (vidéo sur YT) 

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