• Véronique Sanson | 2020

 

Musicales du Parc des Oiseaux
Villars-les-Dombes
10 septembre 2020

 
Fin d’été dans le monde d’après. Anxiogène. Liberticide pour notre bien ou notre malheur selon les opinions. Le temps est au sacrifice. La culture paie un très lourd tribu. On étouffe tous un peu… Au loin, une date comme un phare dans la nuit, une oasis multicolore dans ce désert culturel (annulations de spectacles en chaîne, projets reportés, réouvertures des salles de cinéma et de théâtre a minima…) : celle du seul concert de l’année pour Véronique Sanson, ses musiciens, ses techniciens et toute l’économie afférente. Elle figure donc en lettres capitales sur l’agenda, tentant fièrement d’ignorer l’épée de Damoclès que représente la probabilité d’une nouvelle interdiction de se déplacer à plus de 100 km ou la menace de cas de Covid-19 parmi l’équipe.

© LC

Quelques jours avant, les répétitions dissipent toute crainte : les musiciens ont tous répondu à l’appel. Tout le monde est bronzé, reposé. Bien sûr il n’est pas possible de créer un show entièrement nouveau pour une seule et unique date et, qui plus est, en deux jours de répétitions. Ce sera donc la version longue de la tournée actuelle qui mine de rien entre dans sa quatrième année. Pour l’heure, seule une chanson fait son entrée dans la setlist : Toi et moi

Véronique vient en voisine. Tee-shirt noir sous veste à carreaux rouge et noir, jeans, cheveux relevés avec un chouchou. Visage hâlé et rang de perles avec une tête de mort en faux diamants autour du coup. On se salue du coude en se souriant des yeux. Sa sœur Violaine est déjà là, qui lui fait la surprise de sa visite. Elles sont en forme, ont dansé tard dans la nuit l’avant-veille à un mariage. La répète commence par Vols d’horizons. On s’approche du piano pour entendre la voix : tout comme les guitares et les claviers, elle résonne uniquement dans leurs Ears. La rythmique prévaut, les chansons sonnent de façon presque tribale. On réalise la puissance de la batterie et des percus, celle des ponctuations cuivrées : ça tourne d’enfer ! 

Arrive Rien que de l’eau. Difficile de rester sans bouger. Véronique, qui a remarqué du coin de l’œil que je suis en train de filmer, va chercher Violaine et l’entraîne sur la piste. « Habillée en fille », comme elle s’était décrite elle-même quand on l’avait retrouvée à Paris, elle se lance. On a bien envie de piquer quelques fleurs (celles qui décorent cette salle qui sert aussi à des mariages) dans ses cheveux, dénuder une de ses épaules pour en faire une Marie Laforêt grandeur nature. Les yeux s’écarquillent, le sourire de Véronique s’agrandit démesurément : les deux sœurs ont la même folie en tête, c'est un vrai régal de les voir comme ça. 


Véronique attrape quelques (fausses) bougies et les dispose en mode « allumées » sur le piano et la petite table à côté. On passe aux titres acoustiques. Problème : la guitare de Mehdi est toujours à Triel. Qu’à cela ne tienne, Violaine se propose d’aller la chercher. Pour la blague, elle revient avec la guitare dans un caddie (qui traînait devant la salle) : « Je ne l’ai pas trouvée, alors je suis allée t’en acheter une chez Carrefour » ! Une pause et c’est Amoureuse. Les premiers couplets nous parviennent presque a capella. Émotion.

 
© LC

Fin d’après-midi. Il faut en garder un peu pour le lendemain. Véronique demande si on peut prévenir les gens de venir au concert avec un masque noir : « Sinon ça va me faire vraiment drôle quand je vais les voir de la scène… » On picore dans les friandises à disposition avant de songer à rentrer à Paris. Véronique : « Je vous raccompagne jusqu’à la porte » ;-)

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Trois jours plus tard, c’est déjà le Grand Jour. Finalement, c’est arrivé vite ! Le Parc des Oiseaux est un endroit unique. Une île, où tout le monde est tranquille. En y repensant seulement maintenant, gros regret d’avoir suivi les recommandations et de n’avoir pas pris d’appareil photo… D’autant que mon sac n’a jamais été fouillé. Il semblerait que les pandémies fassent oublier les précautions face aux risques terroristes…

Parce qu’on arrive au moment où tout le monde fait la queue pour aller voir un spectacle d’oiseaux en vol, on a le Parc pour nous tout seuls ! Grand luxe. On hésite sur le port du masque mais les employés du Parc en arborent… On suit donc le mouvement, et le sens de la visite. Flamants roses, aras, pingouins, nandous (dont un qui semble en fin de carrière et sur lequel on s’attarde un peu) sont au menu de la promenade. Y a même des kangourous ! Se pose tout de même in petto la question de ce qu’ils doivent bien considérer le soir venu comme une pollution sonore, et que nous appelons de la musique. La saison du festival des Musicales ne doit pas être leur préférée…

Arrivés à l’extrémité nord du Parc, on aperçoit les gradins, la scène. Il est à peu près l’heure prévue pour les balances. Encore une preuve de l’existence de Dieu ! Contrairement aux autres années (Véronique a déjà joué ici en juin 2015 et en juillet 2019), et pour des raisons de situation sanitaire, la scène a été recréée à l’autre bout de l’étang. La vue est splendide. Quand le soleil descendra un peu, la scène sera à contre-jour, mais pour le moment ça va. 2 000 petits sièges en plastique attendent leurs occupants d’un soir. Ils sont plutôt inconfortables, sans doute fait exprès pour que les gens se lèvent tout le temps… On en choisit un plutôt face piano, pas trop loin. Les musiciens débarquent tranquillement. Ils sont au taquet, comme le dit François Constantin. Mehdi s’installe direct au piano. Pas le dernier pour la blagounette, il joue l’intro d’un titre de France Gall/Michel Berger ! Démarrage ensuite sans attendre la patronne : les loges sont de l’autre côté, il faut faire plusieurs voyages en voiture pour en venir. Dignes, dingues, donc…, Ces moments-là déboulent en versions instrumentales, karaokés parfaits.  


© LC

Véronique arrive en manteau ! Mais quel manteau : à dominante verte, avec des motifs camouflage jusque dans la capuche et des animaux cousus un peu partout, dont une girafe. Une pièce unique (en son genre et tout court). François B., masque sur le nez, le lui retire délicatement alors qu’elle est déjà assise au piano, avant de lui installer ses Ears. Elle défait le bandage de son petit doigt. En piste ! L’énergie est palpable. Pas un concert depuis Pleyel… C’est un peu comme si on mettait dans une arène romaine un lion nourri au yaourt depuis 8 mois : elle a faim de faire de la musique !

Bien sûr elle ne force pas sa voix – pas nécessaire pour une balance – mais on sent bien qu’il n’y a aucun lézard de ce côté-là. Un texto d’Alexandre Morat (celui-là même de la chaine YouTube Alexandre | Musique !) nous apprend qu’on entend tout, de l’autre bout du Parc. Adieu la surprise de la chanson ajoutée sur la setlist, à la fin de laquelle Véronique lance : « Et si on commençait par celle-là ? », tandis qu’elle est déjà calée juste après Marie


© LC

Marie, Ainsi s’en va la vie… Elle bataille avec quelques suites d’accord, joue ce qui précède à la vitesse de la lumière (comme on le ferait en chantonnant), s’arrête sur le point d’achoppement et ne passe à autre chose que lorsque ses doigts ont mémorisé. C’est ça quand on n’écrit pas des trucs simples… 

Quittant son piano, Véronique remet son masque. Il est pratiquement 19 heures. Une jeune femme qui travaille pour le Parc l’attend pour l’emmener voir les rapaces…

 


© LC


On revient un peu plus tard, pratiquement aux mêmes sièges. Devant nous, on reconnaît pas mal d’habitués, dont certains croisés dans le Parc. Pas une place de libre hormis les 4-5 rangées réservées aux élus locaux qui arriveront à la dernière minute, donnant sans doute à penser à certains que c’est leur faute si le concert ne commence pas à l’heure dite ! Il y a quelques lanceurs d’applaus. la salle semble hésiter entre réelle impatience et attente pas si désagréable devant le magnifique spectacle du soleil couchant derrière la scène. Une chose est sûre : chaude ambiance en vue.

© Christian Meilhan

21 h 20, les musiciens sont enfin sur scène. Un projecteur bleu transforme le grand arbre à droite en statue. Véronique entre d’un pas qui semble presque modeste, avant de laisser éclater toute son énergie, accompagnant d’un geste fort chaque ponctuation rythmique, traversant le plateau de part en part. Elle affiche une mine superbe. Un vrai petit diable bondissant, avec toujours ce sourire logo, son plus beau maquillage. Nous voilà embarqués pour 2 heures et demie d’un voyage dont on croit tout savoir, mais qui ce soir encore ne lassera pas. Mais faudra quand même penser à des changements pour les festivals annoncés pour 2021, OK ? ;-) 

À la fin du premier titre, elle dit sa surprise devant ces rangées de masques (Tous les sourires qu’on verra pas), se veut rassurante face à la pandémie : « C’est comme ça, faut pas s’affoler ». Quelle que soit la couleur de nos masques, elle ne peut hélas pas les rater, pointe juste le fait que ça va faire bizarre quand on va incliner nos têtes, mimant des rectangles se balançant de gauche à droite. Elle demande à tous de chanter quand même. La sensation sera curieuse : à l’inspiration, le tissu du masque se colle contre la bouche, et à l’expiration, le souffle tend le masque mais contient la voix. Certaines sortent comme étouffées. Sentiment d’unité.

La setlist se déroule dans le même ordre que les années précédentes mais – et ce n’est pas une surprise – un concert n’est pas une représentation de théâtre : le show a beau être hyper-méga-rôdé, tourner à plein régime (solidement rythmé par Jean-Baptiste Cortot), on y note quelques nouveautés dans les solos (Renaud Gensane dans Monsieur Dupont, Yannick Soccal dans Toi et moi et Bertrand Luzignant dans Et s’il était une fois). Quant à la diablesse tout de noir vêtue, elle ne ménagera jamais sa peine, ignorant pour toujours le sens du mot « économie ». Sur tous les fronts, rayonnante et généreuse de tout ce qui fait qu’elle est Véronique Sanson, elle fait de cet unique concert de 2020 un moment dont on sent bien qu’on va le sauvegarder dans nos disques durs intimes. Même les Caresse-moi de Bahia sont nouveaux !  

On admire un détail au passage : les projecteurs balayant la scène pile au moment où le noir se fait à la fin de Rien que de l’eau. L’impression que Véronique, les bras en croix, va s’envoler. Un effet super-héros qui lui va bien au teint. 

© Dominique Laurent

Présentation des musiciens. Bertrand Luzignant vient de faire un impressionnant numéro au cœur de Et s’il était une fois mais il n’est pas toujours facile de se souvenir des noms de famille. Chacun en aura fait l’expérience au moment de présenter X à Y. Alors imaginez lorsque vous avez deux heures de show dans les pattes et rêvez d’une bonne douche parce que la sueur vous dégouline dans le cou... À ma voisine de derrière qui s’est empressée d’imaginer à voix haute que si « Luzignant » ne venait pas directement au cerveau de Véronique, c'est que la petite bouteille sur le piano ne contenait pas (rien) que de l’eau, j’aurais volontiers collé un bourre-pif, mais je suis indéfectiblement non violent…

Yannick Soccal, birthday-boy du jour, a droit à un petit sketch : Véronique lui chante Happy Birthday, suivie par les musiciens. Soudain, elle s’immobilise : « C’est normal qu’on fasse tous des fausses notes ? » (vidéo ici)  


© Dominique Laurent

Sortie de scène. « Je vais me faire belle ». Les musiciens en profitent pour prouver une fois de plus qu’ils ne sont pas manchots. À son retour, elle arbore la fameuse veste rouge avec le squelette dans le dos pour Bernard’s Song, suivi d’accolades et de bisous sans arrière-pensées pour les mesures sanitaires – C’est pas bô, c’est pas bien…


© Florence Dubray

Le premier titre solo est Mortelles pensées. Allez je fais mon coming out : je ne suis pas fan de la partition de violon (un peu trop fort d’ailleurs, ce soir) sur ce titre. Comme l’impression d’un décalage, que ces arrangements n’épousent pas idéalement la mélodie originale. Mais ça n’enlève rien au jeu d’Anne Gravoin. Vient Ma révérence, imparable et souverain. Pas de Petit visiteur ce soir, d’où le petit incident au départ d’un magnifique Bahia choral où chacun s’époumone derrière son masque. Masque – si l’on veut être totalement honnête – qu’on a presque oublié pendant la durée du concert…

Elle quitte la lumière devant une foule debout. S’il y avait quelques indécis au départ, ils sont aujourd’hui tous dans sa poche. Une nouvelle mission de distraction de la réalité qu’elle aura accomplie avec les honneurs.

On croit d’abord que les accès loges sont sur le côté droit, on nous dit qu’il faut se dépêcher. Mauvaise pioche. Du coup, on aurait pu rester parler un peu avec les premiers rangs… Lorsqu’on arrive au bon endroit, Véronique est dans la loge des musiciens. Joyeux debriefing. François Constantin en postera quelques photos sur sa page Facebook.

© Christian Meilhan

Que dire à une artiste aussi perfectionniste que Véronique lorsqu’elle vous parle d’abord de petits « pains » au piano (perçus par moins d’1 % du public) tout en ayant l’air de mettre de côté l’extraordinaire qualité de son show (perçue par 200 % du même public – j’inclus ceux qui ont regardé les vidéos en ligne) ? Pas sûr d’avoir une bonne réponse… En tout les cas, on s’y emploie. Et on le redit ici : ce show unique dans une année tout à fait particulière a été pour tous une parenthèse enchantée dans un lieu qui l’est tout autant. Elle interroge autour d’elle : « Et cette situation… Vous croyez que ça va durer encore longtemps ? » 

La jeune femme qui l’a emmenée voir les rapaces vient la saluer. Véronique raconte les petits aras. « On peut y retourner ? » Nous voilà partis avec une lampe torche. Oups, on les a réveillés ! Ils se pressent contre la vitre, adorables.

Retour en loge. Les musiciens s’en vont. Elle enfile son fameux manteau vert, ne va pas tarder non plus

Sur la route, en voiture, on aperçoit enfin ce qu’elle cherchait avant d’attaquer Toi et moi : une parfaite demi-lune, rousse…   



Liens vidéos YouTube :

Et je l’appelle encore par Dominique Laurent

Toi et moi par Émilie Ma

Toi et moi par Claudine Mettoudy

Toi et moi (extrait) par Dominique Laurent

La loi des poules par Émilie Ma

Rien que de l’eau par Dominique Laurent

Rien que de l’eau par Regina Noix de coco

Je me suis tellement manqué par Regina Noix de coco

Flamingo Nights + Bernard’s Song par Émilie Ma

Flamingo Nights + Bernard’s Song par Dominique Laurent

Et s’il était une fois + Présentation des musiciens par Dominique Laurent

Saluts par Dominique Laurent

Dignes, dingues, donc (extrait) / Dans ces moments-là / Monsieur Dupont (extrait) / L'écume de ma mémoire par oim




 

• Lionel Florence | 2020



Lionel Florence
Jules
 
23 janvier 2020
  
Lionel Florence avait déjà été approché par le monde de l’édition mais il répondait généralement qu’il était plus à l’aise dans le format court d’un texte de chansons. Pourtant l’année dernière il s’est laissé convaincre, a osé envoyer quelques feuillets à une inconnue. Intuitif, le garçon… et intuitive, la dame… Encouragé (l’inconnue travaillait dans l’édition), il a passé quelques mois plongé dans un passé encore trop proche pour apporter ses réponses à la question qui figure en sous-titre du livre (Pourquoi se suicider quand on a 26 ans ?) et rendre publiquement justice au garçon qu’il aimait.

La lecture se fait d’un seul trait. Comptez un peu plus de deux heures – on dirait une recette de cuisine ;-) On passe alors par toutes sortes d’émotions : la surprise (devant l’ignominie d’une telle maltraitance envers un enfant), la révolte (devant tant d’injustice et d’impunité), le soulagement (quand le jeune héros semble enfin s’en sortir), l’espoir (quand se dessinent des jours meilleurs) même si on connaît l’issue… Mais ici pas de pathos, pas d’apitoiement sur le sort, pas d’appel à la haine… Il arrive même qu’on se marre, au détour d’une page.  

Le découpage du livre brille par son habileté, là où un récit chronologique des faits aurait fait sombrer le lecteur. On est tantôt dans le récit pur, tantôt avec le héros qui se parle à lui-même, mais aussi avec l’auteur qui dialogue avec lui au fur et à mesure qu’avance leur relation. Mais ce qui touche surtout, c’est le courage qu’il faut pour raconter un drame aussi intime avec autant d’honnêteté, et surtout sans complaisance.  

© Lionel Florence, Autoportrait, 2001

À ce stade, je dois préciser que je connais bien l’auteur, rencontré en 1994 par l’entremise d’un ami commun perdu de vue ensuite – un peu comme si son rôle dans nos destins avait consisté à accompagner notre coup de foudre amical. Je connais bien l’animal, sais qu’il est homme de surprises, mais j’avoue que je n’avais pas vu venir celle-ci… En effet, tout comme il n’avait pas prévenu à l’époque ses amis de la préparation du disque Entre sourires et larmes, il n’a pas pipé mot de la préparation de ce livre – hormis à son frère en écriture, Patrice Guirao, qui signe une superbe postface. Goût du secret ? Superstition ? Sans doute un peu des deux. Lionel aime surprendre. Avec ce livre, j’avoue qu’il m’a bluffé.

Ce n’est pas un grand lecteur. Après vérification, il avoue même n’avoir jamais entendu parler de Pour en finir avec Eddy Bellegueule auquel certains aspects de son livre auraient pu faire penser. On songe aussi très brièvement aux ouvrages où Roger Peyrefitte relatait sa relation avec Alain-Philippe Malagnac, le côté suranné en moins. Lire ces ouvrages ou d’autres l’aurait sans doute entravé. Persuadé que chacun possède en soi ce dont il a besoin au moment voulu, il préfère aller explorer ses mémoires antérieures, faire remonter dans la solitude les informations accumulées par des générations avant lui.

Puisse cet écrit venger l’enfance détruite de son amour disparu et l’aider à continuer à vivre sans lui.

Lien de commande

© Lionel Florence, 2001

• Véronique Sanson | 2019



Véronique Sanson
Salle Pleyel, Paris
 
30 et 31 décembre 2019
 
Derniers tours de piste d’une tournée au long cours, étendue sur plus de 2 ans, ces 102e et 103e concerts Dignes, dingues, donc… (si mes calculs sont exacts) ont pourtant affiché complet. Véronique Sanson, que voulez-vous… L’indestructible tornade blonde… 

Malgré la grève des transports, il manque peu de spectateurs à l’appel le premier soir. Pour le second, c’est un peu plus compliqué avec le quartier entièrement bouclé, des stations de métro fermées… Les ouvreuses proposent même de resserrer les rangs au moment de l’entracte et on pense aux messages aperçus dans la journée de ceux dans l’obligation de revendre leurs places, coincés chez eux, rêvant de Pleyel…

Peu de people (ou d’“huiles essentielles”, comme dit Florence Dubray) : de Catherine Deneuve à Léa Salamé, de Laurent Delahousse à Marc Lavoine, beaucoup ont déjà vu ce spectacle. Seuls les fidèles parmi les fidèles sont revenus : Bernard de Bosson (les “bravo !” les mains en porte-voix, c’est lui), Didier Varrod, Franka Berger, Daniel Schick, Thomas Sotto. Éric Jean-Jean (RTL), Fabienne Sintes (France Inter) et Éric Chemouny (Je suis musique) sont là également.

Tout a commencé lundi après-midi avec les balances. Même vide, la salle est impressionnante. Sur scène, les cordes répètent sous la direction perfectionniste d’Anne Gravoin. Puis débarquent un à un les musiciens. Mehdi sera la voix témoin sur Dignes, dingues, donc… avant de rejoindre le piano et se faire les doigts sur Et je l’appelle encore. Doigts qui aligneront ensuite quelques notes qu’on reconnaît… Non, il n’a pas fait ça… Mais si ! C’est Gigi l’Amoroso !!! 


© LC

Arrivée de Véronique avec une sacrée dégaine de bikeuse (comme avait dit Augustin Trapenard) : chemise en jeans délavée sans manches siglée Harley Davidson sur tee-shirt blanc et surtout ce fameux chapeau de cow-boy offert par son plus jeune fan, récemment tombé sous le charme. Dans l’ordre, elle répète Vols d’horizons, Ainsi s’en va la vie, Marie, Radio vipère et Mortelles pensées. Il est encore tôt, mais la voix est déjà forte, un peu “rocailleuse” comme elle dit elle-même au micro à l’ingé son, à qui elle demande une réverb’ plus longue. Christian fait quelques photos. On salue Nicolas Maisonneuve, aux manettes des lumières les deux soirs après avoir beaucoup travaillé pour Bruel. Tout s’annonce le mieux du monde, et pourtant on sera encore un cran au-dessus !

À quoi tient le ressenti d’un spectacle ? À ce qui se passe sur scène bien sûr, à notre disponibilité, à ce qu’on a dans la tête au moment précis où l’on est dans la salle… mais aussi aux gens qui nous entourent, à leurs vibrations. Le premier soir, j’étais voisin du neveu de Barbara, et le second de quelqu’un de l’équipe Coullier. Voyages très différents… Plus globalement, on peut comparer les publics : le premier soir, la salle accueillera Véronique debout, pas le second. Le public se levera après Mr Dupont (sa magnifique intro signée Renaud Gensane, la toujours impeccable séance d’abdos), pas le lendemain. À ma grande surprise, certains crieront “Non” pour conjurer son “que je suis seule au monde” à la fin de Ma révérence. Pas vu ça depuis très longtemps… Là encore, ce ne sera pas le cas le lendemain.
Les deux soirs, en revanche, on constatera sur scène d’inédites harmonies sur Je me suis tellement manqué. On notera les “Marie” répétés en écho. Avant La loi des poules, le premier soir, elle précisera qu’il y en a au moins un qui connaît les paroles dans la salle, avant de se reprendre : “Non deux” ; le deuxième soir, elle mettra ses lunettes pour voir “si tout le monde [la] regarde bien” et se réjouira des “bonnes têtes, vachement souriantes” avant de terminer la chanson dans un fou rire (vidéo ci-dessous).

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Les deux soirs, avant les rappels piano-solo, elle voudra nous faire croire qu’elle ne veut surtout pas déranger : “Vous préférez peut-être aller vous coucher… Si c’est le cas, je trouve ça consternant…” (rires). Derrière moi, une femme lâchera “Mais elle est incroyable !”. Bah oui, madame…  
On notera également son emploi fréquent de l’anglais (“Ready?”), sans doute dû à la présence de Titou ; on s’arrêtera sur ses mains jouant avec le projecteur rose sur Et je l’appelle encore ou faisant l’oiseau sur l’intro de Monsieur Dupont ; on suivra ses regards vers les premiers rangs et ces sourires qu’elle lance à ceux qu’elle reconnaît.
Le second soir, lors de pensées toujours d’actualité, la tendresse deviendra plus raffinée que les caresses… Des détails qu’on note ici pour les mémoriser, en l’absence de captation.
© LC

Après les concerts, les prolongations ont également été différentes d’un soir à l’autre. Une surprise d’abord le 30 avec des applaudissements saluant l’arrivée de Véronique dans l’espace où elle est attendue, ouvrant bientôt sur un cocktail. Du jamais vu en ce qui me concerne, tandis qu’Éric Chemouny précise que ça arrive fréquemment pour son amie Sylvie Vartan. Pêle-mêle, on verra Bernard de Bosson en grande conversation avec une ex de son fils, qui tient absolument à une photo entre lui et Titou ; Véronique dédicaçant une photo sur un dos offert, celui de Violaine ; Laurent Boyer demandant à Véronique de signer une affiche du spectacle ; Daniel Schick et Marc Kraftchick qu’on immortalise avec Véro ; la femme de Basile Leroux confirmant qu’elle a toujours été au courant de la demande en mariage de Véro (cf. sketch dans la présentation des musiciens) ; Tony Frank souriant, toujours en forme…

© LC

Le 31, passé minuit, en sortant de la salle et en découvrant les trottoirs et les rues bondés, les klaxons, la pollution, les insultes,
c’est à Cioran et ses merveilleux aphorismes qu’on pense : « À peine dehors, je m’écrie : “Quelle perfection dans la parodie de l’Enfer ! » 
Vite, se remettre en tête les injonctions de Véronique : “Soyez heureux ! Ne soyez pas grégaires !” et son “À super vite, peut-être en 3030, ce sera bien !”

Capture d’écran vidéo © Martine Sellier

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