• Rita Mitsouko + divers / 1985


MERCI BAILA !

publié
en juillet 1985 dans Rock Non Stop

Le « plus » des Rita Mitsouko, c'est incontournablement la chanteuse. Complètement « chiée de la tête », entre l'épouvantail et l'attraction de foire, Catherine Ringer, look Madame Mim cheap et potentiel vocal énorme (en plus, elle peut prendre tous les accents !) est incontestablement la force du duo. C'est son intérêt pour la danseuse Marcia Moretto qui lui a fait écrire ce texte, qui tient plus des propos d'une aliénée que des compositions habituelles (pour notre plus grand bonheur) : « Et même toi / Qui est forte comme une fusée », « C'est elle / La sauterelle / La sirène en mal d'amour » (Marcia Baila).

Le couple sait aussi faire preuve d'un lyrisme débridé. Ainsi en témoigne cet extrait de Jalousie : « Elle est ailleurs / Avec sa conne de mère / Qui croit / Qu'elle est encore à elle / Celle-la, un de ces jours je l'enculerai ».

Musicalement, le groupe donne dans l'éclectisme bariolé, patchwork fou d'influences, de sons et de voix qui n'auraient jamais dû se croiser. Fred vient d'un groupe néo-punkisant (Flash rouge) et les égéries de Catherine s'appellent Oum Khalsoum, Siouxsie ou Nina Hagen. Ajoutons à cela que M. et Mme Mitsouko ont l'ouïe convenablement développée et que chaque son enregistré dans la journée (du marteau-piqueur en bas jusqu'au Welcome to the Pleasure Dome qui passe à la radio) peut ressurgir à tout instant, au détour d'un sillon de l'album.

Le résultat est donc à leur image : inattendu, anti-homogène, insolite, furieux et international.

Rita Mitsouko à Reims : ambiance torride et accueil plutôt chaleureux lorsque la formation débarque sur scène. Catherine, ignorant une fois pour toute la nuance, arbore une superbe robe jaune canari avec des fleurs violettes (qu'elle a du voler à sa concierge) sous une petite veste bleue du meilleur goût, son énorme masse de cheveux (elle n'a pas sa natte) écrasée sous une casquette de skaï noir (avec lanière sous le cou), maquillée à l'emporte-pièce. Elle ne bronche pas sous les quolibets de mon voisin : « Boudin ! », puis « Mongolienne ! ».

Les titres s'enchaîneront très vite, le groupe assurant bien derrière elle, un peu brouillon, un peu speed, mais mettant toujours en valeur la voix de Catherine, d'une grande puissance et finalement insuffisamment exploitée sur l'album.

A la fin du show, toutes lumières allumées, c'est le tollé général et Rita Mitsouko reviendra pour deux rappels, dont le superbe Oum Khalsoum.

Pour le moment, ils ne semblent pas encore « récupérés » ; leur passé musical et théâtral avant-gardiste (Catherine a joué dans une comédie musicale rock de Marc O et a participé à diverses entreprises de théâtre musical) transparaît encore dans leurs prestations. Le fait de vendre des disques ne leur est apparemment pas encore monté à la tête. Leur look et attitude de scène ressemblent toujours davantage à des négligences qu'à des détails prémédités. Et c'est plutôt bien ainsi.

Même Mitterrand a, paraît-il, beaucoup ri en les entendant à un cocktail-spectacle organisé par Autrement !



Chroniques Maxi-45 tours dans le même numéro



FINE YOUNG CANNIBALS / Johnny Come Home


Fraîchement catapultés au devant de la scène jazzy-new-wave anglaise, les Fine Young Cannibals étaient à Paris mi-septembre pour relancer la promo de Johnny Come Home, titre accrocheur et efficace à profil de hit (beat à la Bronski, trompette bouchée et voix black), passé inaperçu à sa sortie en France.
Les cannibales anglais sont trois : Andy Cox (guitariste au jeu de jambes étonnant) et David Steel, tous deux issus du split de The Beat (remember le ska ?), plus un chanteur, grand escogriffe black, Roland Gift, découvert sur la scène d'un revue bar londonien où il officiait comme… strip-teaser.
leurs influences musicales ? Elles sont résolument datées (Billy Holiday, Otis Reading). Les FYC déclarent ne pas écouter ce qui se fait aujourd'hui mais se refusent à dénigrer qui que ce soit (« La vie est trop courte pour dépense de l'énergie à dire du mal des autres »). Gentil, non ?
C'est à la suite de leur passage à The Tube, show télé anglais, qu'ils ont décroché leur contrat chez London Records et enregistré Johnny, expédiant le tournage de leur vidéo en deux heures.
Contactés pour participer à un défilé de mode pour Comme Des Garçons, ils réservent leur réponse, travaillant actuellement d'arrache-pied sur un album qu'ils veulent riche, « permettant une écoute longue durée ». Sortie annoncée pour décembre, précédée d'un second maxi mi-octobre.


BRONSKI BEAT with MARC ALMOND / I feel love


Rubrique gay rock maintenant avec ce duo historique en tête des charts anglais depuis début mai : Marc Almond et Jimmy Sommerville, invertis notoires, reprenant le mégahit de Donna Summer, celle la même qui refroidit l'an dernier son public homosexuel avec deux-trois lieux communs assassins et bien sentis.
Le seul intérêt de cette version est de nous présenter le mariage de deux voix profondément opposées : l'une, répétitive, de tête, contre l'autre, puissante, chaude (ah ces soupirs !) et imaginative.
Ont-ils voulu se venger ?
NB. également disponible sous la forme d'un 25 cm limited edition (un Cake Mix en face A, un Fruit Mix en face B).



NNA HAGEN / Universal Radio

Tous aux abris ! La grosse Germaine est de retour ! Hurlante, le cheveu rose fluo violent, un globe terrestre pressé contre les deux siens, elle tonitrue « I'm driving in my car / And I'm talking to myself ». Rythme électrofunk et habituels croassements du 3e type, production brillante (signée par un associé de Trevor Horn). C'est un hit, indiscutablement !

• Les Communards / Kate Bush / Marc Almond & Bronski Beat1985

Chroniques non parues / 1985



Body Politic (premier nom des Communards) à Paris

Nous autres, au pays de la baguette de pain et du camembert, côté nouveautés rock, on est rarement en avance : à nous les vagues échos des tournées triomphales à l'étranger et les imports hors de prix (les pressages français n'étant disponibles que des mois plus tard), aux autres les previews, exclusivités et consort.
Pour une fois, nous avons fait la nique à bien des gens en accueillant en première mondiale Body Politic, nouveau groupe de Jimmy Somerville (fraîchement splité de Bronski Beat) acoquiné d'un jeune homme plutôt disgracieux (mais pianiste émérite), Richard Coles.
La scène se passait dans ce qu'on appelle pudiquement un « espace au masculin » (dixit le carton d'invitation) et qui n'est autre - oh surprise - qu'une nouvelle boite homo (modèle avoué : le gay tea-dance du dimanche après-midi).
Manifestement chez lui, jimmy, sobrement vêtu d'un polo bleu piqué d'une étiole rouge sur un pantalon clair, le cheveu peroxydé bien peigné, a tout d'abord interprété des reprises camp, très je-veux-être-Judy-Garland-à-la-place-de-Judy-Garland (Sentimental Journey et Summertime), nous foudroyant sans difficulté apparente de ses aigus parfaits et assassins.
Le reste du récital (une dizaine de titres au total) comportait deux morceaux disco dans la lignée Bronski et les deux titres qui composeront leur premier single, à paraître en septembre : Dolorosa, complainte d'inspiration ibérique et You are my World (en unique rappel), très belle love song dont Jimmy a repris le dernier refrain en français (« Tou é mon mondeu »).
Ce mini-concert organisé en dehors des maisons de disques mérite une belle publicité… mais chut ! Jimmy ayant quitté Bronski Beat parce que, enfermé dans un infernal circuit de promo non stop, il ne pouvait se livrer à ses activités militantes politiques comme il le souhaitait et regrettait son anonymat, pas un mot de plus...





Kate Bush – Running up that Hill (maxi 45 T / EMI)

Alors que Madonna s'agitait frénétiquement en tête des charts dans un fracas de quincaillerie bon marché, Kate Bush préparait dans l'ombre son comeback, confortablement installée dans le studio qu'elle a fait aménager chez elle.
Aujourd'hui, sûre d'elle, la main gantée de peau, Kate décoche une première flèche, Running up that Hill, qui la révèle plus que jamais engagée sur les périlleux chemins du perfectionnisme, courageuse et déterminée, entrant directement dans les dix premières places des charts, où elle figure encore.
« If I only could, I'd make a deal with God »… Voix de sirène sur rythmique charge de cavalerie,
Running up that Hill sonne le retour en force du plus délicieux minois britannique. Tendez votre poitrine côté gauche que la flèche ne rate pas son but !
NB. Pourquoi le pressage français un mois après l'anglais ?




Marc Almond / Bronski Beat – I feel love (maxi 45 T / London Records)

Rubrique gay-rock maintenant avec ce duo historique en tête des charts anglais depuis début mai : Marc Almond et Jimmy Sommerville, invertis notoires, reprenant le mégahit de Donna Summer, celle-la même qui refroidit l'an dernier son public homosexuel avec deux-trois lieux communs assassins et bien sentis.
Le seul intérêt de cette version est de nous présenter le mariage de deux voix profondément opposées : l'une répétitive voix de tête contre l'autre, puissante, chaude (ah, ces soupirs !) et imaginative. Ont-ils voulu se venger ?
N.B. Egalement disponible sous la forme d'un 25 cm limited edition (un Cake Mix en face A, un Fruit Mix en face B).