Maria Callas
Lettres et mémoires
Montpellier
12 janvier 2022
Il fait un froid de gueux. L’hôtel est à 4 minutes de la gare, l’opéra à 4 minutes de l’hôtel : autant dire qu’on ne verra pas grand chose de Montpellier cette fois-ci… Le but du voyage n’était certes pas de faire du tourisme mais c’est dommage : Montpellier a l’air d’être une très jolie ville.
En réalité le but du voyage, c’est elle : Maria Callas ; elle : Monica Bellucci ; et lui : Tom Volf, metteur en scène d’un spectacle dans lequel dansent main dans la main élégance et nostalgie. Une soirée d’une autre époque, donc... (risque de passer pour un vieux con parfaitement assumé).
On est en joyeuse compagnie : Violaine et son fils Julien ont également fait le déplacement de Paris. Pas d’autre choix pour ce rendez-vous : après quelques dates à Paris en 2019, puis une longue interruption pour les raisons qu’on ne connaît que trop bien, il y a bien eu quelques dates en Italie et en Grèce mais il n’y en aura hélas pas d’autres cette année en France...
Pas un strapontin de libre sous la splendeur rouge et or de cet opéra inauguré sous Sadi Carnot. Public éclectique, international : autour de nous, on entend parler allemand, espagnol ainsi qu’une langue asiatique.
Le rideau se lève sur l’orchestre, prélude tout en douceur de Mascagni (merci le programme : je ne suis pas si familier que ça avec ce répertoire).
La sculpturale silhouette de Monica Bellucci glisse lentement sur la scène, contourne le canapé et vient sagement s’y asseoir, mains croisées sur les genoux. Attitude étudiée mais parfaitement fluide.
Superbe maintien, cheveux sages, hauts talons, elle apparaît comme statufiée dans une robe noire dont le programme nous apprend qu’elle a appartenu à Callas elle-même et n’a jamais été portée depuis sa mort. Empreint d’une belle dignité, son visage réussit presque à nous distraire de suivre les courbes vertigineuses de son anatomie.
On est d’abord surpris par sa façon de s’exprimer, de séquencer les phrases, de parler dans le souffle puis, très vite, on est sous le charme. Monica Bellucci est créditée sur le programme avec le joli mot de récitante. Sa voix ne changera donc que très peu de ton, se faisant de plus en plus lasse au fur et à mesure que les nuages se multiplient dans le destin tragique de la cantatrice ici reconstitué chronologiquement à travers ses mots – ses mémoires interrompus et un choix de lettres parmi une abondante correspondance traduite par Tom Volf et sortie en librairie en 2017. L’ensemble révèle une Callas amoureuse et travailleuse, soutenue par une foi en
elle-même et en Dieu, sans orgueil mais avec une juste et pleine
conscience de son talent.
Rien n’est surjoué ici, tout est feutré. Le spectateur s’adapte, s’extirpe de bonne grâce d’un quotidien où tout va toujours plus vite. Les smartphones éteints accumulent des informations qui seront lues plus tard. Notre pouls change de rythme, nos yeux se reposent, nos visages se détendent et la magie opère : on déploie toute notre attention vers la scène, à l’écoute de tourments d’un passé ressuscité le temps d’une soirée, régulièrement interrompus par les grands airs de Bellini, Verdi ou Puccini avec – charme supplémentaire – le bel accent de la comédienne.
Retour au réel sous les applaudissements, et le plaisir de voir Monica Bellucci sortir du rôle et saluer avec le chef d’orchestre (Gwennolé Rufet) et Tom Volf – une scène souvent vue en story sur Instragram, bien plus appréciable du balcon d’un opéra…
On n’aura pas le plaisir de la saluer, mesures sanitaires oblige. Simplement le pouvoir de l’imaginer attablée à un dîner en son honneur, à côté de son metteur en scène, dans le restaurant chic devant lequel on passe en chemin vers l’hôtel...
Prochaines dates 2022 :
21-22 avril : Istanbul
24 avril : Londres
26-27 mai : Saint-Pétersbourg
28-29 mai : Moscou
À suivre :
Juillet : Festival Peralada (Espagne)
Septembre : New York
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